Une nouvelle étude, menée par des scientifiques de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm), du Centre national de la recherche scientifique (CNRS), de l’École normale supérieure et de l’université Paris-Saclay, a mis en avant le pouvoir prédictif de l’intelligence artificielle (IA) dans le cadre de maladies psychiatriques et plus précisément des troubles anxieux. Les résultats, publiés dans la revue Molecular Psychiatry indiquent que l’IA est capable de détecter dès l’adolescence des signes avant-coureurs de l’anxiété qui surviendraient chez le jeune adulte.
Prédire l’apparition de #troublesanxieux dès l’#adolescence grâce à l’intelligence artificielle #IA, le pari réussi d'une équipe #inserm @ENS_ParisSaclay @UnivParisSaclay @CentreBorelli @CNRS
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— Inserm (@Inserm) January 9, 2023
Trois signes identifiés
Pour arriver à ce résultat, plus de 2 000 adolescents des deux sexes ont rempli des questionnaires en ligne sur leur état de santé psychologique à l’âge de 14, 18 et 23 ans. « Le suivi dans le temps des volontaires a permis de mesurer l’évolution du diagnostic de l’anxiété », explique l’Inserm. Puis, une étude d’apprentissage statistique, qui s’appuie sur un algorithme d’intelligence artificielle, a permis de déterminer si certaines des réponses formulées à l’adolescence (14 ans) avaient une incidence sur le diagnostic de troubles anxieux à l’âge adulte (18-23 ans). Les chercheurs ont alors mis en évidence trois signes prédicteurs : le neuroticisme, c’est-à-dire « une tendance persistante à ressentir des émotions négatives (peur, tristesse, gêne, colère, culpabilité, dégoût), une mauvaise maîtrise des pulsions, et une inadaptation face aux stress » ; le désespoir « associé à un faible score de réponses faites aux questionnaires évaluant l’optimisme et la confiance en soi » et les symptômes émotionnels qui « recouvrent les réponses aux questionnaires indiquant des symptômes tels que “ des maux de tête/ d’estomac ”, “ beaucoup de soucis, souvent inquiet ”, “ souvent malheureux, abattu ou larmoyant ”, “ nerveux dans les nouvelles situations, perd facilement confiance ”, “ a facilement peur ” ».
Utiliser l’IRM pour aller plus loin
En complément de l’IA, les chercheurs ont également se sont aussi appuyés sur l’imagerie par résonance magnétique (IRM) pour observer le cerveau des volontaires. Comme son développement implique un changement de volume de différentes régions cérébrales au moment de l’adolescence, les scientifiques ont cherché à identifier une éventuelle modification au niveau de la matière grise. « Si l’imagerie n’a pas permis d’améliorer la performance de prédiction des troubles anxieux dans leur ensemble par rapport aux seules données issues des questionnaires, elle pourrait néanmoins permettre de déterminer plus précisément un type de trouble anxieux vers lequel une personne est susceptible d’évoluer », explique l’Institut.
« Notre étude révèle pour la première fois qu’il est possible de prédire de façon individualisée, et ce dès l’adolescence, l’apparition de troubles anxieux futurs, constate Jean-Luc Martinot, coauteur de l’étude, directeur de recherche à l’Inserm et pédopsychiatre. Ces prédicteurs ou signes avant-coureurs identifiés pourraient permettre de détecter les personnes à risque plus tôt et de leur proposer une intervention adaptée et personnalisée, tout en limitant la progression de ces pathologies et leurs conséquences sur la vie quotidienne. »
21 % des adultes touchés par des troubles anxieux
On estime que 21 % des adultes seraient concernés au moins une fois au cours de leur vie par les troubles anxieux. La personne qui en souffre ressent « une angoisse forte et durable sans lien avec un danger ou une menace réelle, qui perturbe son fonctionnement normal et ses activités quotidiennes », indique l’Inserm. Ces troubles ont plutôt tendance à apparaître ou à se consolider au début de l’âge adulte, même s’ils peuvent parfois débuter dans l’enfance ou à l’adolescence. « Ainsi, un meilleur repérage dans ces tranches d’âge éviterait une aggravation des symptômes au cours de la vie », considère l’Institut.