Le consortium international de chercheurs IciStem, dont fait partie l’Institut Pasteur, a annoncé une « probable guérison » d’un homme touché par le virus de l’immunodéficience humaine (VIH) après une greffe de moelle osseuse, dans un article publié le 20 février dans la revue Nature Medicine. C’est la troisième fois qu’un tel cas est décrit après le patient de Berlin en 2009 et celui de Londres en 2019. Cette fois-ci l’homme est suivi à Düsseldorf en Allemagne.
VIH : 3e cas de probable guérison dans le monde après une greffe de moelle osseuse#VIH #Sida #40yearsHIVhttps://t.co/Qf1GIbyNQs
— INSTITUT PASTEUR (@institutpasteur) February 20, 2023
Un patient atteint d’une leucémie et du VIH
Le patient en question a appris qu’il était atteint du VIH en 2008. Il débute un traitement antirétroviral en 2010 qui lui permet de contrôler l’infection et de réduire la quantité de virus à des niveaux indétectables dans le sang. En 2011, les médecins lui diagnostiquent une leucémie (un cancer des cellules du système immunitaire localisé dans la moelle osseuse). Il est alors traité par chimiothérapie mais rechute. En 2013, il reçoit une greffe de cellules souches de la moelle osseuse issues d’un donneur bien spécifique : une personne portant la mutation génétique CCR5 delta-32 qui empêche le virus d’entrer dans les cellules. Cette greffe est un véritable succès. La leucémie est vaincue et, en 2018, plus aucune trace du VIH n’est observée dans le corps du patient. Son traitement antirétroviral est donc arrêté, mais il continue à faire l’objet d’un suivi médical pendant plus de 3,5 ans, période durant laquelle aucune particule ou réservoir viral n’est détecté dans son sang ou ses tissus.
Une procédure qui reste exceptionnelle
Comment expliquer ce résultat ? La greffe a permis de remplacer les cellules immunitaires du patient par celles du donneur, ce qui a eu pour effet de faire disparaître l’immense majorité des cellules infectées par le VIH. Une procédure efficace, mais qui n’est malheureusement pas reproductible à grande échelle : « Tout d’abord, il est nécessaire de trouver un donneur compatible au niveau immunogénétique pour éviter le rejet de la greffe, explique Asier Sáez-Cirión, responsable de l’unité Réservoirs viraux et contrôle immunitaire à l’Institut Pasteur, et coauteur principal de l’étude dans un communiqué. De plus, étant donné que moins de 1 % de la population générale porte cette mutation protectrice du VIH, il est très rare qu’un donneur de moelle compatible ait cette mutation. Au final, il s’agit d’une situation exceptionnelle quand tous ces facteurs coïncident pour que cette greffe soit un double succès de guérison, de la leucémie et du VIH ».
Poursuivre les recherches
Même si, pour l’heure, le traitement antirétroviral demeure la meilleure alternative thérapeutique pour la majorité des malades, ce nouveau cas de guérison est porteur d’espoir. Il prouve qu’il existe une solution pour lutter contre le VIH. « Différentes stratégies sont à l’étude, indique Asier Sáez-Cirión. Certaines cherchent à cibler et éliminer spécifiquement les cellules infectées, d’autres à rendre les cellules résistantes à l’infection sans passer par une greffe en introduisant par exemple la mutation CCR5 delta-32 via une thérapie génique, et finalement d’autres stratégies visent à optimiser les réponses immunitaires contre le virus ». Nul doute que dans les prochaines années, les chercheurs continueront à faire des avancées majeures dans la lutte contre cette épidémie qui touche plus de 38 millions de personnes dans le monde (chiffre 2021, Onusida).