En France, un actif sur deux se dit gêné par le bruit au travail
Du 16 au 21 octobre s’est déroulée la 8e édition de la Semaine de la santé auditive au travail. Une campagne organisée par l’association Journée nationale de l’audition (JNA) pour sensibiliser les acteurs de la santé et les entreprises aux effets néfastes du bruit sur la santé des travailleurs
Plus qu’une simple initiative, cette campagne a été imaginée comme un véritable « appel à l’action », indique l’association dans son dossier de présentation. Il faut dire que nous vivons dans une société particulièrement nocive pour notre santé auditive. Avec la révolution industrielle d’abord puis la généralisation des open spaces ensuite, le milieu professionnel ne fait pas exception. Dans ce contexte, plus qu’une question de confort, l’audition des travailleurs constitue une véritable préoccupation de santé publique.
Une gêne ressentie par la majorité des travailleurs
Selon le dernier baromètre Bruit, santé auditive et qualité de vie au travail (Ifop-JNA, de septembre 2023), un actif sur deux (52 %) se dit gêné par le bruit sur son lieu de travail. Ce chiffre monte même à 62 % dans l’agglomération parisienne et jusqu’à 64 % chez des ouvriers. En effet, le secteur agricole et de l’industrie, mais aussi le bâtiment et travaux publics (BTP) et le commerce sont ceux où le niveau d’exposition au bruit est le plus fort, selon les personnes interrogées.
Un risque pour le bien-être mental des salariés
Cette gêne auditive constatée par les actifs n’est pas sans conséquences. Professionnelles d’abord : 60 % des interrogés estiment que la nuisance sonore est source de fatigue, de lassitude et d’irritabilité, et un sur deux indique qu’elle génère du stress.
Personnelles ensuite, puisque 52 % des répondants soulignent que ce bruit a un impact sur la vie privée (dont 66 % des 25-35 ans). Ils sont même 32 % à évoquer des répercussions sur la qualité de leur sommeil.
Tout cela influe inévitablement sur la productivité (augmentation du nombre d’erreurs et de l’absentéisme, baisse du sentiment d’appartenance des employés et manque d’attractivité), mais aussi sur l’ambiance de travail.
Dans ce contexte, 70 % des sondés se disent alors prêts à faire des efforts pour limiter les nuisances sonores dont ils sont responsables. En dehors du bruit provenant de l’extérieur des locaux, qui constitue, pour 34 % des interrogés, la principale source de pollution sonore, les conversations des collègues (31 %) et les allers-retours des personnes (28 %) sont en effet les nuisances sonores estimées comme étant les plus dérangeantes.
Les entreprises pas assez soucieuses de la santé auditive
Les entreprises aussi ont leur part de responsabilité. Selon l’étude, près d’un actif sur deux (49 %) estime que l’enjeu du bruit et des nuisances ne sont pas assez pris en compte par l’employeur.
L’organisation de l’espace de travail (open space, bureaux fermés à plusieurs…) constitue le principal frein à la réduction du bruit au travail, à 48 %, suivie de près par la nature de l’activité (46 %). Si des solutions existent bel et bien, elles restent discrètes. Seules 31 % des entreprises auraient mis à disposition de leurs salariés des protections individuelles contre le bruit (bouchons en mousse, bouchons en silicone, casques antibruit passifs ou actifs, etc.). Et elles ne sont que 26 % à leur proposer des casques de communication spécifiques.
Mais la JNA ne s’avoue pas vaincue, et invite les entreprises à faire des efforts. « La santé auditive est une valeur éthique fondamentale qui doit être intégrée au cœur des entreprises, indique-t-elle. Les niveaux sonores excessifs ne doivent plus être acceptés comme une norme incontournable. Au contraire, la réduction du bruit devrait être une préoccupation éthique partagée par tous les acteurs de l’entreprise. »
Accompagner les entreprises dans leur démarche de qualité de vie au travail
La JNA met ainsi en avant l’importance du rôle des dirigeants dans la création d’un environnement de travail respectueux de la santé auditive. « Les leaders d’entreprise ont le pouvoir d’influencer les décisions et les politiques liées au bruit », estime l’association. Elle encourage d’ailleurs « les dirigeants à être des modèles de changement en prenant des mesures concrètes pour réduire l’empreinte de pollution sonore au sein de leurs organisations. » Pour elle, « cette implication renforce la crédibilité de l’entreprise en matière de responsabilité sociétale et envoie un message clair : la santé auditive est une priorité indiscutable ».
L’association propose donc d’accompagner les entreprises, afin de les aider à créer des environnements de travail favorables à la santé auditive des employés. Des kits composés d’affiches, guides et dépliants sont mis en vente. L’organisation de dépistages, ateliers et conférences sur différentes thématiques de l’audition est également proposée.
© C i E M / Constance Périn