Bisphénol A : les Européens y sont encore trop exposés
La forte exposition des consommateurs européens au bisphénol A, présent notamment dans les contenants alimentaires, inquiète. Et pour cause : elle représente un risque pour la santé de millions de personnes.
« L’exposition du public au bisphénol A, largement utilisé, dépasse les niveaux acceptables pour la sécurité sanitaire », c’est la conclusion alarmante d’une note d’information publiée par l’Agence européenne de l’environnement (AEE). Elle fait état des résultats d’une étude menée dans les onze pays de l’Union européenne. Elle révèle que tous les participants ont été en contact avec ce produit chimique « au-delà des seuils » réglementaires.
Une exposition par voie alimentaire
Le bisphénol A est une substance chimique de synthèse utilisée couramment pour la fabrication industrielle de plastiques. Elle entre dans la composition de nombreux matériaux contenant des aliments, tels que ceux en polycarbonate (vaisselle, récipients, boîtes…) ou les emballages avec un revêtement protecteur (canettes, boîtes de conserve, couvercles métalliques…). L’exposition des populations se fait donc principalement par voie alimentaire.
Les effets du bisphénol A sur la santé
Mais quels sont les risques ? Des travaux de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses), réalisés en 2011, ont mis en avant des effets sanitaires avérés chez l’animal sur la reproduction, la glande mammaire, le métabolisme, le cerveau et le comportement. Chez l’homme, elle suspecte des effets sur la reproduction, le métabolisme et les pathologies cardiovasculaires. Dans les deux cas, les impacts sont présents même « à de faibles niveaux d’exposition ».
Le 14 juin 2017, sur proposition de la France, le comité des États membres de l’Agence européenne des produits chimiques (Echa), a officiellement identifié le Bisphénol A comme perturbateur endocrinien pour la santé humaine. Elle l’a également qualifié de substance « extrêmement préoccupante ».
En avril 2023, l’Autorité européenne de sécurité des aliments (Efsa) a publié un avis sur les risques pour la santé publique de l’exposition au bisphénol A. Elle confirme des impacts nocifs : perturbations endocriniennes, diminution de la fertilité, allergies cutanées. Elle ajoute également à cette liste le fait que ce produit peut « endommager le système immunitaire humain à de très faibles doses ».
Réduire l’exposition
En France, l’Anses a rapidement recommandé une réduction des expositions au bisphénol A. Elle a appelé à sa substitution dans les matériaux au contact des denrées alimentaires. En 2010, le pays suspend ainsi la commercialisation des biberons au bisphénol A. En 2011, c’est au tour de l’Union européenne de l’interdire.
Puis en 2015, la Commission européenne publie une feuille de route. Elle fixe une dose journalière tolérable bien supérieure à celle préconisée par l’Anses.
Ces différentes mesures semblent avoir été insuffisantes. Car, « les données de biosurveillance sur les niveaux de bisphénol A dans les urines humaines montrent que l’exposition est encore trop élevée, malgré les différentes mesures réglementaires mises en place depuis 2015 », constate l’AEE. « L’exposition de la population au bisphénol A en Europe est donc trop élevée et pourrait constituer un problème sanitaire », ajoute-t-elle. Des efforts restent à faire pour protéger la population.
En attendant, pour limiter son exposition individuelle, il est possible de suivre les conseils du ministère de la Santé. Celui-ci recommande de privilégier la cuisine faite maison ; de préparer les denrées dans des plats en verre, inox, fonte ou bois non traité ; d’éviter les poêles antiadhésives (lire à ce sujet notre article « Faites sauter les toxiques ! ») et les bouilloires en plastique ; de ne pas réchauffer au micro-ondes des aliments dans des récipients en plastique.
© C i E M / Léa Vandeputte