Les dons d’organes en croissance régulière en 2023
L’Agence de la biomédecine a publié son baromètre annuel des activités de prélèvement et de greffe d’organes. Si le nombre de patients sur liste d’attente est toujours aussi important, les opérations effectuées et les donneurs recensés continuent eux d’augmenter en 2023.
Une politique volontariste, des chiffres encourageants mais toujours insuffisants. C’est le constat tiré par l’Agence de la biomédecine dans son rapport annuel sur l’activité de prélèvement et de greffe d’organes. Ainsi, 5 634 transplantations ont eu lieu en 2023, soit une augmentation de 2,5 % par rapport à 2022. De même, 3 132 donneurs ont été recensés (+ 4,9 %), et 577 greffes ont eu lieu grâce à des donneurs vivants, un chiffre également en hausse de 8,3 %. Le nombre de patients décédés en liste d’attente est lui en baisse de 22,6 %.
Des résultats positifs, mais à nuancer, quand on sait que près de 21 866 patients sont encore en attente d’une transplantation, dont 11 422 en liste active. « Pour qu’un malade puisse recevoir une greffe et continuer à vivre, cela nécessite une coordination extraordinaire, qui réussit 15 fois par jour : cela débute par l’accord des proches du défunt, l’identification des patients receveurs compatibles, le prélèvement et le transport de chaque greffon vers sa destination puis, enfin, la greffe des patients receveurs », explique Marine Jeantet, directrice générale de l’Agence de la biomédecine, dans un communiqué. « Il n’y a pas d’âge pour recevoir un organe comme il n’y a pas d’âge pour les donner, nous sommes tous concernés, tous donneurs, tous receveurs. »
Les greffes de tissus augmentent aussi
Si la majorité des greffes n’ont pas retrouvé leur niveau d’avant le Covid-19, le nombre global d’opérations est en hausse constante depuis 2021, après avoir chuté de 25 % en 2020, au plus fort de la pandémie et des tensions dans les hôpitaux. Ainsi, le chiffre des 5 634 greffes réalisées l’an passé, qu’il s’agisse de transplantations cardiaques, pulmonaires, hépatiques ou rénales, tutoie les 5 901 recensées en 2019. Il reste bien supérieur au moins de 4 500 de 2020.
Les greffes de tissus comme les cellules cutanées, la cornée, les cartilages ou les artères, ont aussi augmenté, de 11,5 % en 2023. Seuls les prélèvements d’os ont baissé de 2,8 %. Des indicateurs encourageants qui s’inscrivent au cœur du quatrième plan ministériel pour le prélèvement et la greffe d’organes et de tissus, qui semble jusqu’ici porter ses fruits.
Des objectifs à court et long terme
D’ici à 2026, ce plan greffe est construit autour de cinq grands objectifs : la nomination d’un référent « prélèvement et greffe » au sein des agences régionales de santé (ARS) ; la création d’indicateurs de performances sur la qualité d’organisation et de rendement des établissements ; la professionnalisation et l’accompagnement des personnels qualifiés dans le domaine ; le développement du prélèvement multisources pour faire face à la baisse du nombre de donneurs ; et la révision des modalités de financement des prélèvements, afin d’être plus incitatif.
Ce plan d’action s’étend sur la période 2022-2026 (lire notre article). Pour l’année 2024, trois axes de développement ont été identifiés par l’Agence de la biomédecine. L’implication accrue des directeurs de centres hospitaliers universitaires (CHU) et des commissions médicales d’établissement, le maintien de la greffe et des prélèvements en tant que priorité nationale dans le secteur de la santé, et la généralisation des greffes rénales avec donneurs vivants et des prélèvements « Maastricht III ».
Maastricht III, une avancée qui fait débat
Les greffes dans le cadre de prélèvements « Maastricht III » n’ont été autorisées qu’en 2005 avec la loi Leonetti et continuent de faire débat au sein de la communauté médicale. Ces prélèvements sont effectuées sur des « personnes victimes d’un arrêt cardiaque après qu’une décision d’arrêt des thérapeutiques actives en réanimation a été prise en raison d’un pronostic particulièrement défavorable » selon la définition de la Société française d’anesthésie et de réanimation (SFAR).
Une situation particulière résumée par « l’Espace éthique » des Hôpitaux de Paris : le défunt avait-il exprimé une position sur le don d’organe avant son décès ? La décision prise par la famille d’arrêter les soins peut-elle être influencée afin de prélever des organes plus rapidement ? La nécessité d’une décision rapide dans le cadre d’un prélèvement peut-elle être instrumentalisée par certains médecins ? Autant de questions qui ont poussé à la création d’un code de procédure strict en la matière.
En parallèle, l’Agence de la biomédecine a publié une enquête annuelle sur la perception du don d’organe. Comme depuis plusieurs années, 80 % des Français sont favorables au don de leurs organes à leur propre mort et 93 % pensent qu’il est important de connaître la position de leurs proches sur la question. Seul bémol, moins de 50 % des Français ont évoqué le sujet avec leur entourage.
© C i E M / Mathieu Yerle